Dans le cadre du Projet de Loi de Finances (PLF) 2025, un amendement propose une réforme majeure concernant l'exonération de l'impôt sur la plus-value immobilière lors de la vente d'une résidence principale. L’objectif ? Limiter la spéculation immobilière en conditionnant cette exonération à une durée minimale de cinq ans d’occupation.
En réalité, cet amendement pourrait soulever des problématiques sans véritablement faire obstacle aux spéculateurs.
Une réforme pour lutter contre la spéculation immobilière ?
La plus-value immobilière réalisée lors de la vente d'une résidence principale est actuellement exonérée d'impôt, une mesure qui a permis à de nombreux propriétaires de revendre leur bien sans être soumis à une taxation sur les gains. Cependant, cette exonération a aussi favorisé des pratiques spéculatives, notamment dans les zones à forte demande où les prix de l'immobilier augmentent rapidement. Certains investisseurs en ont ainsi profité pour acheter un bien, le déclarer comme résidence principale, puis le revendre rapidement, bénéficiant ainsi de l'exonération fiscale.
L'administration fiscale peut déjà remettre en cause cette exonération si elle prouve que l'achat du bien avait une finalité purement spéculative. Toutefois, pour renforcer cette lutte contre la spéculation, le PLF 2025 introduit un amendement visant à conditionner l’exonération de la plus-value à un délai de détention minimal de cinq ans. En d'autres termes, pour pouvoir bénéficier de cette exonération, le propriétaire devra avoir occupé son bien pendant au moins cinq ans consécutifs avant de le vendre.
Cet amendement cible particulièrement les zones immobilières tendues, comme les zones touristiques, où la pression sur le marché immobilier est forte. Le but recherché est de réduire les achats-ventes rapides, souvent utilisés par les spéculateurs pour échapper à l’impôt tout en profitant de la hausse des prix. L’objectif est de stabiliser le marché immobilier en incitant à une détention plus longue des biens, ce qui permettrait de limiter l'envolée artificielle des prix et de faciliter l'accès à la propriété pour les habitants locaux.
Des exceptions à cette règle limitant sa portée
Ce nouveau délai de cinq ans d’occupation ne s’appliquera pas dans toutes les situations. Des exceptions ont été prévues pour éviter de pénaliser les propriétaires confrontés à des changements de vie imprévus. Ainsi, la plus-value immobilière restera exonérée si la vente intervient en raison de motifs impérieux tels que :
- Une mutation professionnelle ;
- Une hospitalisation de longue durée ou une entrée en EHPAD ;
- Un décès ou une séparation.
De plus, cette exonération pourra être maintenue sans condition de durée si la vente permet de financer l’acquisition d’une nouvelle résidence principale, afin de ne pas pénaliser les propriétaires qui vendent leur bien pour en acheter un autre, dans le cadre d’une mobilité résidentielle légitime.
Impact sur le vendeur de bonne foi qui veut louer avant d'acheter une résidence principale ?
L'amendement du PLF 2025 pourrait créer de nouveaux défis pour certains vendeurs de bonne foi. Par exemple, ceux qui préfèrent louer temporairement avant d’acheter une nouvelle résidence principale risquent de perdre l’avantage de l’exonération s’ils ne respectent pas le délai de cinq ans. Cela pourrait contraindre les ménages à maintenir leur bien en propriété pour éviter une imposition, même s'ils souhaitent déménager.
Impact sur les spéculateurs ?
La question de l’impact de cette réforme sur le marché immobilier suscite des débats. Pour les partisans de cette réforme, la durée minimale de détention de cinq ans pourrait avoir un effet positif en fluidifiant le marché. En limitant les achats spéculatifs à court terme, la réforme permettrait aux acheteurs à la recherche d’une résidence principale d’avoir un accès plus équitable au marché, sans devoir subir l’effet de la spéculation.
Cependant, certains experts du secteur estiment que cette mesure pourrait nuire à la mobilité résidentielle, en particulier pour les jeunes ménages ou les personnes amenées à déménager fréquemment. Ceux-ci risquent de se voir contraints de conserver un bien immobilier pendant une période plus longue qu'ils ne le souhaiteraient.
Et au-delà des débats ?
Dans les faits, rien n’empêchera un spéculateur d’acheter un nouveau bien pour y établir sa résidence principale et perpétuer ses achats-ventes. Il bénéficiera ainsi de l'exonération sur la plus-value immobilière, à moins que l'administration fiscale ne requalifie cette activité en commerce de biens immobiliers, une mesure qu’elle est déjà en mesure de prendre. La pertinence de cet amendement en tant que frein à la spéculation reste donc contestée.
Conclusion : Une réforme qui complexifie sans résoudre le problème de la spéculation
La réforme proposée dans le PLF 2025, conditionnant l’exonération de la plus-value immobilière à une durée de détention de cinq ans, vise à freiner la spéculation immobilière, en particulier dans les zones tendues. Si l’objectif de cette mesure est louable – stabiliser le marché et rendre l’accès à la propriété plus équitable pour les habitants locaux – elle soulève plusieurs interrogations quant à son efficacité réelle. En effet, malgré l’intention de limiter les pratiques spéculatives, la réforme pourrait se révéler inefficace face à des spéculateurs astucieux qui pourraient facilement contourner la règle en rachetant de nouveaux biens sous couvert de résidence principale.
Par ailleurs, les exceptions prévues pour des motifs de force majeure ou de mobilité résidentielle légitime soulagent certains propriétaires, mais risquent d’entraver la fluidité du marché pour ceux qui souhaitent simplement acheter puis louer un bien avant de se stabiliser. Enfin, la mise en œuvre de cette réforme semble poser un dilemme : bien qu’elle cherche à protéger les ménages face aux effets de la spéculation, elle pourrait aussi pénaliser ceux qui ont besoin de plus de flexibilité sur le marché immobilier. Dans l’ensemble, malgré de bonnes intentions, cette réforme pourrait ne pas suffire à limiter efficacement la spéculation, tant les échappatoires restent nombreux et la complexité de sa mise en œuvre préoccupante.